MEDICO-SOCIAL : NE LAISSONS PAS LE FINANCEMENT TUER LE SENS

20/05/2025
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Le secteur médico-social occupe une place essentielle dans notre société. Il accompagne, soutient et soigne des personnes fragilisées par la vie : personnes âgées, en situation de handicap, en grande précarité. C’est un pilier silencieux de la solidarité nationale, un lieu d’humanité au quotidien.

 

Mais aujourd’hui, ce secteur est en tension extrême. Son modèle économique, déjà fragile, atteint ses limites. Derrière les murs des établissements et des services, les équipes tiennent… mais à quel prix ? Et jusqu’à quand ?

 

Une pression croissante, des moyens stagnants

 

Les attentes à l’égard du secteur ne cessent d’augmenter : innovation, qualité, attractivité, transition numérique et écologique, mise en conformité réglementaire, adaptation aux nouveaux besoins. À cela s’ajoute l’impératif de recruter et de fidéliser dans un contexte de pénurie de professionnels.

 

Pourtant, les moyens financiers ne suivent pas. Les CPOM (contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens) se révèlent souvent trop rigides. Les dotations publiques, qu’elles proviennent des Agences Régionales de Santé ou des Départements, restent reconduites à l’identique, sans réelle adaptation aux dynamiques de terrain ni à l’inflation galopante.

 

Dans le même temps, les coûts explosent : salaires revalorisés (Ségur, SMIC, primes), énergie, alimentation, charges générales. Or, les besoins des usagers augmentent en nombre comme en intensité.

 

La seule variable d’ajustement restante devient alors l’organisation elle-même. Partout, on cherche à optimiser, à réduire, à différer. Mais une ligne rouge demeure : celle de la dignité humaine. Et cette ligne, les professionnels s’acharnent à ne pas la franchir.

 

Investir dans l’humain… sans marge de manœuvre

 

Les établissements et services médico-sociaux doivent aujourd’hui relever des défis majeurs : généralisation du numérique, mise en œuvre de la transition écologique, renforcement des démarches qualité, conformité aux exigences de la HAS.

 

Mais ces transformations nécessitent des investissements lourds. Or, dans la majorité des cas, les budgets sont entièrement absorbés par les charges fixes. Les appels à projets existent, mais restent souvent complexes à mobiliser, ponctuels, et peu adaptés aux réalités des petites structures ou des territoires fragiles.

 

Le paradoxe est saisissant : on exige de ces structures qu’elles soient à la pointe, tout en les privant des leviers nécessaires pour agir.

 

Ce secteur ne demande pas la charité. Il demande la justice.

 

Face à ces constats, il est essentiel de rappeler que le secteur médico-social ne réclame pas "plus" pour le principe. Il ne revendique pas des privilèges. Il demande simplement les moyens de faire bien. Et il sait comment faire.

Les équipes sont compétentes, engagées, inventives. Elles sont prêtes à innover, à transformer, à anticiper. Mais elles ont besoin d’oxygène. D’un cadre économique qui leur redonne de la visibilité, de la stabilité, et un minimum de souplesse pour agir.

 

Trois leviers pour redonner du souffle au secteur

 

Si nous voulons construire un avenir durable pour le médico-social, trois priorités doivent guider l’action publique :

 

  1. Financer la qualité, ce n’est pas un coût : c’est un investissement.
    Derrière chaque euro investi se trouvent des vies humaines mieux accompagnées, des parcours mieux pensés, des équipes plus sereines.
  2. Stabiliser les ressources, c’est redonner du temps long aux acteurs.
    Sortir de la logique de gestion à court terme permet de construire des projets solides, pérennes, au service des territoires.
  3. Faire confiance aux acteurs de terrain, c’est libérer l’innovation de proximité.
    Les solutions existent, souvent simples, toujours adaptées. Encore faut-il créer les conditions pour qu’elles émergent.

Ne pas agir, c’est prendre un risque collectif

 

Aujourd’hui, nous avons le choix. Soit nous continuons à laisser les structures se débattre seules, au risque d’un effondrement silencieux. Soit nous décidons, collectivement, de bâtir un nouveau pacte économique et humain, à la hauteur des enjeux.

 

Car la fragilité d’un modèle économique ne concerne pas que les professionnels : elle concerne l’ensemble de la société. Prendre soin de celles et ceux qui en ont besoin n’est pas une option. C’est un devoir.